Le corbeau des lavoirs by Claire Connan

Auteur:Claire Connan [Connan, Claire]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Policier
ISBN: 9782372602457
Éditeur: Éditions Du Palémon
Publié: 2021-09-23T22:00:00+00:00

* * *

17. Qui vient d’ailleurs.

11

Aux aurores, les gendarmes se présentèrent devant la propriété Touzé. Muriel insista pour être présente. Mérieux cogna à la porte. Sylviane se montra à la fenêtre et fit signe qu’elle descendait. Quelques instants plus tard, elle apparut sur le seuil.

— Nous allons procéder à la perquisition de votre domicile ! déclara l’adjudant-chef.

L’ensemble de la brigade se déploya dans la maison. Toute menue dans une chemise de nuit de coton blanc qui avait dû appartenir à sa mère, Sylviane se tenait debout, hébétée, au milieu du capharnaüm. Si fragile, touchante presque, femme enfant. Comment imaginer qu’elle ait pu être impliquée dans ces meurtres ? Muriel mourrait d’envie de se précipiter vers elle pour la consoler. Mais elle devait se montrer professionnelle, même si aucun rôle précis ne lui avait été attribué pendant la perquisition.

Dans la chambre de Sylviane, comme dans le reste de la maison, les gendarmes décrochèrent tous les tableaux. Le Bec attrapa le cadre sur la table de chevet, le démonta et en sortit le portrait de la jeune femme. Il prit une pose que Muriel considéra comme tout à fait déplacée et marmonna une réflexion du genre « Canon, la nana ». Puis, comme si ses doigts le brûlaient, il laissa choir la photographie sur le lit. Sylviane se précipita et, sous l’œil vicelard de l’élève gendarme, la pressa contre son cœur.

La perquisition s’avéra un échec. Muriel se félicita d’avoir subtilisé l’article de journal relatant la séance de tonte. Ce détail aurait accablé Sylviane.

Avant de partir, Marcel Mérieux, planté devant le piano, commença à tapoter les touches. Muriel avait bien remarqué qu’il lorgnait l’instrument depuis un moment.

— Vous permettez ? demanda-t-il à Sylviane.

— Il n’est pas accordé… bredouilla-t-elle.

Elle eut un étourdissement. Muriel se précipita vers Mérieux et referma d’autorité le couvercle. Le gendarme ôta ses doigts à temps.

— Eh, qu’est-ce qui te prend ? protesta-t-il.

— Stop, Marcel ! ordonna le chef Dupuy.

Mérieux se retourna, confus.

— Je suis désolé, mademoiselle, marmonna-t-il. Vous avez raison, ce piano n’est pas accordé, il y a même des touches qui ne s’enfoncent pas du tout.

— Comment ça, pas du tout ? s’écria l’adjudant-chef.

Perplexe, Muriel observait Sylviane et sa mine déconfite.

Le gendarme Mérieux souleva l’abattant, plongea sa main sous les marteaux des notes les plus aiguës, brandit à la lumière une grande enveloppe kraft, et l’ouvrit.

— C’est un paquet de cartes postales de Notre-Dame-des-Fontaines. Toujours les mêmes. Derrière chacune d’elles est écrite une lettre de délation. Anonyme bien entendu.

Muriel étouffa un cri de surprise. Qui avait dénoncé qui cette fois ?

— Mademoiselle Sylviane Touzé ! s’exclama le chef Dupuy. Cela mérite une explication. Vous allez nous suivre à la gendarmerie. Le Bec, emmène mademoiselle Touzé dans sa chambre pour qu’elle s’habille.

— Je vais l’accompagner ! décida Muriel. Une femme c’est mieux pour ces choses-là.

— Ah, d’accord, fit Dupuy en haussant un sourcil hésitant, faites vite.

Il rechaussa ses lunettes en écaille. Muriel et Sylviane grimpèrent l’escalier. Le visage de Sylviane, tremblant et fragile auparavant, s’était soudain fermé, durci, en un mutisme rageur.

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